Road-trip - Volume II

Suite et fin

1 - Hoi An - Hué

De Hoi An, la route du nord passe par Da Nang. L’intérêt est limité à ce niveau là, par la ville, peut-être une des plus grises, bétonnées et sans âme du Vietnam. Mais pour que cela puisse rendre ma matinée désagréable, il manquait quelques éléments : Un défaut de démarrage sur ma moto a fait l’affaire, avec lui plein de vibrations nouvelles, de parts et d’autres de la structure ; assez pour que je me prépare mentalement à devoir la laisser au bord du chemin et continuer par d’autres moyens, puis la chaîne qui se décroche au milieu de ce fameux feu. Je mets peut-être une heure à faire dix pour cent du trajet, mais le reste se passe assez bien et j’arrive assez tôt pour visiter une bonne partie de la ville, sans le moindre enthousiasme, je pense encore à la moto qui me fatigue. Le soir je m’incruste à la table d’une adorable dame de soixante trois ans qui visite un nombre incroyable de pays dans toutes les régions du Monde. Dans la discussion, voyant à quel point je suis exténué et concerné par cette problématique, elle me convainc de rester un peu plus que prévu pour faire checker ma moto par un bon garagiste et me reposer.

 Je fais faire quelques réparations, visite la citadelle d’Hué, qui après avoir été en grande partie détruite lors de la guerre, a été plus ou moins bien restaurée. L’ensemble est un embrouillamini de ruines, de bâtiments aux techniques de construction bien trop basiques et modernes pour sembler authentiques, et de terrains vagues. La vidéo de reconstitution des lieux en 3D est sympa et montre l’ampleur de la cité avant sa dégradation.

2 - Hué - Phong Nha

Phong Nha est située à proximité d’un parc national, détenant plusieurs records du monde en matière de cavernes. La longueur totale du réseau de cavernes et de grottes est estimée à cent vingt-six kilomètres. Accompagné d’une Canadienne et d’un Anglais, je me suis rendu dans deux grottes différentes.

Paradise Cave

Après une bonne ascension d’un nombre incalculable de marches, nous sommes face à l’entrée. L’aperçu que l’on a alors nous aide à réaliser l’immensité du lieu. J’ai l’impression de rentrer dans une cathédrale naturelle, par en haut. Un escalier permet de descendre, puis la visite se fait par une passerelle construite tout le long. À chaque mètre parcouru je me retiens de sortir du chemin et d’aller explorer à ma façon. La grandeur est partout, les stalac-tites et -mites sont magnifiques et se rejoignent parfois. Une partie de la grotte me fait clairement penser à un décor de film. Une allée, relativement droite, avec un bon vingt mètres de ‘hauteur de plafond’, et autant en largeur. On pourrait y faire passer une armée de mûmakil sans aucun problème.

La visite me plaît, le seul point noir étant le cadre touristique qui empêche d’apprécier pleinement l’abîme dans lequel nous sommes. Je rêvais de me retrouver au même endroit sans personne et de méditer pendant des heures.

Dark Cave

Dark Cave est le lieu le plus touristique du parc. La grotte n’est pas éclairée, et on y rentre muni de lampes, après une zip-line de quatre cent mètres de long. La visite est cadrée et en groupe. À la queue-leu-leu, nous découvrons tous avec la même euphorie ce décor étonnant, une rivière dans une grotte. Puis, des pieds dans l’eau, nous passons aux pieds dans la boue. Puis c’est au tour des jambes, et de la taille. Bain de boue dans une grotte : Checked ! Et je le referai si j’en ai l’occasion ! On peut s’étendre et flotter très facilement, c’est un pur bonheur. Dark Cave est plus cher que les autres sites, et c’est plus pour l’activité et l’encadrement que pour la grandeur des grottes, mais je le recommande clairement à ceux qui veulent s’amuser un peu.

3 - Phong Nha - Ninh Binh

Trois cent quatre-vingt-sept kilomètres. Je pars en priant pour la santé de ma moto. Les prières sont exaucées, exceptée un deuxième et dernier arrachement de la chaîne, ne provocant rien d’autre en moi que le réflexe de m’arrêter et de courir la récupérer devant le camion qui allait probablement l’écraser. Ce qui n’aurait pas été gênant ; je demande cette fois une neuve au gars qui m’a sauté dessus depuis le café où il se prélassait pour m’amener chez un garagiste, qui n’était autre que lui-même, et qui pour je ne sais quelle raison a réussi à me bisquer en se foutant ouvertement de ma gueule avec ses camarades. Même avec cette petite difficulté, je reste dans mon timing et arrive à Ninh Binh avant la nuit. La ville est bof, mais le marché à côté du Fleuve rouge est top !

Les montagnes à côté de Ninh Binh sont surnommées « la Baie d’Halong terrestre ». Le paysage y est apparemment similaire, la mer en moins.

Je décide de louer un vélo pour ma première journée. Le vélo est un excellent moyen de découvrir les paysages autour de Ninh Binh. On voit bien plus de choses qu’en moto, et on prend bien plus le temps de les apprécier. Je me laisse guider par mon instinct et arrive à ce qui semble être un lieu touristique. Comme beaucoup d’endroits au Vietnam, il faut garer le vélo à un endroit spécifique et payer un gars pour qu’il ‘surveille’ les vélos. Ici c’est 3000 VND, soit vingt centimes. Je ne me sens pas trop berné, et la visite du lieu est gratuite ! Après recherche, il s’agissait de Bich Dong Pagoda. Un escalier mène à ce qui semble être un petit lieu de culte, sans trop d’intérêt, mais je vois que l’on peut monter bien plus haut par les rochers, chemin que personne d’autre ne semble voir ou souhaiter prendre, alors que la vue d’en haut est magnifique. Une bonne entrée en matière.

Je pédale le reste de la journée dans les petits chemins entourés de rizières, et passe notamment sur une grande route bordées par des vendeuses de cadavres de biches. Une table, avec le tronc et la tête de la biche posé dessus, la tête maintenue bien-sûr par une fourche en bois pour donner plus envie. Selon les stands la proportion de biche restante n’est pas la même. Les plus chanceux ont déjà tous vendu et n’ont plus qu’une tête posée sur leur table. Miam.

Mon deuxième jour je le passe au parc national de Cuc Phuong. Les frais d’entrée sont de soixante-mille VND, et on peut parcourir les vingt kilomètres de route en moto, avec des grottes et des arbres millénaires à voir tout le long, et des chemins de randonnée permettant des boucles vraiment sympa au bout de la route. Au départ de cette route, si l’on prend un petit chemin sur la gauche, on finit par tomber sur une tour d’observation. Le spot parfait pour apprécier une vue à 360° des montagnes.

Une première grotte, la « prehistoric man cave », permet une exploration assez sympa avec entre autres une échelle un peu cachée permettant d’accéder au ‘deuxième étage’ de la grotte, et de redescendre par les rochers pour les plus aventureux. J’aime ce manque de cadre et d’interdictions dans certains lieux touristiques du Vietnam.

La deuxième que j’ai visitée se trouve le long de la boucle que l’on peut faire à pied, en bout de parcours. « Palace cave » Elle a en effet tout d’un palace, avec ses nombreuses galeries cachées ou difficilement accessibles et les grandes différences de taille entre chaque ‘salle’. Passionnant.

Mon séjour à Ninh Binh se termine avec des Français qui font leurs études à Hanoï et une voyageuse qu’ils viennent de rencontrer. Je partirai avec eux à Hanoï, ma destination finale.

La vue vers la fin du trajet, pas trop moche n'est-ce pas ?
La vue vers la fin du trajet, pas trop moche n'est-ce pas ?

 

4 - Ninh Binh - Hanoï

C’est agréable de faire la route accompagné. Le rythme est posé, nous avons tout le temps et il y a seulement quatre-vingt-dix kilomètres à parcourir. En début de parcours nous faisons une halte à Van Long. Balade en bateau sur le fleuve, puis dans une grotte étroite avec juste assez de hauteur pour pouvoir se cogner la tête en visant bien. L’expérience est sublime, car absence quasi-totale de touristes. Un seul autre bateau part en même temps que nous et nous en croisons peut-être trois sur tout le parcours. C’est autre chose que les excursions similaires proposées à Ninh Binh ! Je conseillerais de ne faire que celle-ci, dont le rapport prix/qualité-authenticité-calme-beauté m’a l’air infiniment mieux qu’à Ninh Binh. (aux dires de mes compagnons français ayant vécu l’expérience la veille). Pour l’anecdote ultra-pertinente, King Kong II a été tourné dans ce lieu.

Hanoï - HANOÏ

Nous y sommes. Je suis au terminus de mon road-trip et heureux d’être arrivé. Sur trois jours, je découvre progressivement plusieurs facettes de la ville. D’abord le vieux centre, sa belle cathédrale et les ruelles avoisinantes pleines de vie, de bouffe, de café et de folie. Une soirée sur les quais du lac Hoàn Kiêm, Hô Hoàn Kiêm signifiant « Lac de l’épée restituée ». La légende veut que l’empereur du Dai Viêt (1428 – 1433) ait reçu d’un pêcheur une épée trouvée dans le lac, et qu’une tortue dorée la lui réclame dix ans plus tard, après qu’il ait pu chasser les Chinois de son territoire. Il comprend alors que cette épée était un don du ciel.

Le deuxième jour, c’est en moto que nous parcourons la ville et le pont Long Biên, anciennement pont Paul Doumer, construit dans le style Eiffel, à l’époque de l’Indochine française par l’entreprise Daydé & Pillé. La rapidité de sa construction était une prouesse pour l’époque, et il a à peu près résisté aux bombardements, qui ont tout-de-même abîmé sa structure sans le détruire.

La vérité c’est que l’ouvrage est impressionnant et donne des vues sympa !

Le troisième jour est très chill, il faut encaisser la boisson de la veille. C’est l’occasion d’aller nager dans la piscine d’un hôtel, très agréable et très très peu fréquentée ! Puis de monter au soixante-septième étage de la tour Lotte, seconde plus grande du pays avec deux cent soixante-douze mètres de haut. Une vue à couper le souffle, dans une nuit noire teintée de blanc trouble, la pollution.

 

Grâce à mes compagnons de route, résidant eux-mêmes à Hanoï, j’ai pu voir toute la beauté de la ville sans chercher à le faire. Hanoï est un concentré de Vietnam, et elle reste mon étape favorite de ce pays.

C'est en avion que je m'en éloignerai.

Ma moto ? Elle appartient maintenant à l’heureux gérant du parking de l’aéroport, en guise de paiement dudit parking.

Conduire au Vietnam

☰ Leçon & Bilan n°2 ☰

  • Être patient , surtout lorsque l'on conduit en ville à certaines heures de la journée. Il est possible de rester coincé à un croisement pendant une bonne demi heure quand les motos, voitures et camions qui y passent sont tellement serrés que plus rien ne bouge.
  • Conduire en groupe nécessite beaucoup plus de concentration que tout seul lorsqu'il y a du trafic. C'est logique, mais c'est bien d'y penser, que l'on soit derrière ou devant on peut faire ce qu'il faut pour minimiser le risque de collision lors de chaque mouvement.
  • Ne vraiment pas hésiter. Y aller à la Vietnamienne, c'est-à-dire chacun pour soi, en toutes responsabilités.
  • Observer. Attentivement. Tout ! C'est peut-être le plus basique des conseils mais c'est ce qui permet d'éviter de se trouver dans des situations à risque. Savoir qui est devant nous et si on est vus par eux.

Ces 'leçons' sont peut-être anecdotiques, car chacun découvrira à sa manière les règles qui régissent la circulation au Vietnam, et parce que l'on apprend sur le tas. Je pourrais probablement en rajouter par rapport à ce que j'ai vécu ici, et ce que j'ai écrit là est loin d'être exhaustif.

 

Le mieux c'est de le vivre ! Mon road-trip au Vietnam était la meilleure façon de voyager pour moi et je le conseille à tous les motards chevronnés ou amateurs en manque de voyage !

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Commentaires: 2
  • #1

    Marie (vendredi, 10 mars 2017 17:12)

    Tout ça me donne bien envie de faire de la moto à l'étranger... Mais j'admets que j'ai trop peur pour ça. Déjà qu'en France je n'ai plus aucune confiance en "l'autre" tant j'ai pu voir des actions dangereuses, je ne sais pas si je serais capable de m'adapter à une circulation moins cadrée en moto ;-)

  • #2

    Pierre plr (dimanche, 12 mars 2017 06:35)

    Pour moi moins de cadre favorise l'adaptation. L'humain étant le seul critère à observer.